Par-delà l’androcène

Essai d’Adélaïde Bon, Sandrine Roudaut et Sandrine Rousseau
2022
(Editeur : SeuilLibelle)

Les auteurs

Adélaïde Bon est comédienne. Elle est l’auteur de La petite fille sur la banquise, livre dans lequel elle décrit les ravages causés par le viol qu’elle a subi à l’âge de neuf ans.

Sandrine Roudaut est perspectiviste, conférencière et cofondatrice des éditions La Mer Salée.

Sandrine Rousseau est la députée EELV / NUPES de la neuvième circonscription de Paris.

Le livre

L’anthropocène désigne la période géologique où l’homme a commencé à modifier la nature en profondeur. L’androcène, c’est l’anthropocène genré, l’empire du mal(e). L’humanité se divise en deux : d’un côté, les mâles, les hommes blancs hétérosexuels ; de l’autre, leurs victimes : les femmes, les enfants, les racisés et la classe ouvrière (prolétaires mâles y compris, à condition qu’ils ne gagnent pas plus que le SMIC). Tous les maux de la planète résultent de la domination des mâles sur le restant de l’humanité.

Depuis l’avènement de l’androcène (à partir de Descartes, semble-t-il), la Terre est une vallée de larmes. Le comble de l’horreur : le génocide des sorcières, motivé par la privatisation des communs (espaces villageois cultivés par les femmes).

Par delà l’androcène est une longue plainte victimaire, heureusement limitée à 50 pages par l’éditeur. C’est un manifeste doloriste, quasiment un catéchisme cathare qui – Dieu merci – ne propose pas de sortir de l’enfer terrestre par une endura (1) collective, mais par une grande réconciliation (avec la nature, pas avec les méchants) : tous unis, tournons sept fois autour de Wall Street en chantant et le capitalisme s’effondrera …


(1) Endura : suicide par le jeûne préconisé par les cathares.

Commentaire

Par-delà l’androcène est une pochade indigente, comme en témoigne sa présentation des notions de nature et de culture (2) ; mais ce livre n’a pas l’ambition de révolutionner la pensée contemporaine : il est destiné à servir la stratégie marketing de Sandrine Rousseau.

Faut-il le rappeler ? Sandrine Rousseau est un pur produit de l’appareil d’EELV. A la différence d’Eric Jadot, son principal ennemi au sein du parti, elle n’a jamais participé à quelque combat écologiste que ce soit ; son seul terrain de lutte, ce sont les réseaux sociaux, les studios télé et les coulisses du pouvoir.

L’idéologie dont elle se réclame depuis son retour en politique, l’éco-féminisme, qui a inspiré Par-delà l’androcène, est un des avatars les plus grotesques du wokisme. C’est un mélange de religiosité écologiste et de nombrilisme parisien (3). L’éco-féminisme, c’est la phase terminale de l’écologie politique : on ne voit pas ce qui pourrait venir après …


(2) c.f. page 14 : « La distinction entre culture et nature a été construite pour donner un sens à la soif de puissance, d’hégémonie et de suprématie de quelques-uns. Elle a marqué au fer rouge l’élaboration des sociétés, usant de la terreur comme arme de discipline massive. »


(3) Le désintérêt des éco-féministes pour la révolte des femmes en Iran montre les limites – en particulier géographiques – de leur « radicalité ».